Toutefois, elle prendra la suite de Kaliayev et c’est avec la même détermination qu’elle impose sa décision à ses camarades. Elle lancera la bombe et elle mourra. Mais on peut se demander ce qui l’emporte : la défense de la cause révolutionnaire ou l’amour pour Kaliayev. On comprend qu’elle ne peut vivre sans lui, qu’elle désire le rejoindre dans la mort tout comme elle a exigé le récit détaillé de ses derniers instants afin de les partager. La citation de Roméo et Juliette de Shakespeare, en exergue, incite à comprendre sa volonté de mourir comme un geste d’amour tragique : « O love ! O life ! Not life but love in death » (Ô amour ! Ô vie !
Non pas la vie, mais l’amour dans la mort ! )
Ce concept de l'amour absolu réveille alors en Dora le besoin de crier son amour ici et maintenant pour un et un seul homme; un amour banal, égoïste et total: une passion humaine … et non idéologique. L'adverbe « pourtant », à la troisième ligne de la réplique de Dora marque un tournant important dans ce dialogue: on passe du général au particulier, du groupe à l'individu.
Après une « transition » qui pourrait correspondre aux 2 premières répliques de la page 83 (évocation de la « faiblesse » de Yanek), les deux personnages développent leur conception de l'amour « en général ». « L'amour? Non, ce n'est pas ce qu'il faut. » dit Dora, qui évoque la mission de Yanek et l'Organisation... et qui semble essayer se persuader elle-même de la nécessité de repousser cette idée qui fragilise l'engagement révolutionnaire. Ici c'est elle qui développe les répliques les plus longues; on peut aller jusqu'à la dernière réplique de Kaliayev page 84 qui donne sa conception de « l'amour absolu »: un sacrifice total pour le