Logique de l’hospitalité
Logique de l’hospitalité (Le paradoxe de la souveraineté)
Les spectres hantent le monde – les spectres des immigrés. Cette paraphrase est plus qu’une métaphore: il faut la comprendre littéralement. Car, ce sont les immigrés, souvent invisibles, qui passent les frontières, qui entrent inaperçus sur les territoires étrangers, restent invisibles et ne peuvent qu’à peine prouver leur existence. Enfin, ils font peur. L’immigration est constituée en enjeu politique majeur.
1. L’empire des signes Les signes se multiplient. Les élites politiques deviennent de plus en plus nerveuses. En février 2003 Tony Blair propose de créer des „zones sûres“ hors des frontières de l’Union Européenne, où seraient retenus les demandeurs d’asile pendant le traitement de leur requête. Le conseil européen „Justice et Affaires intérieures“ (devenu „Justice, Liberté et Sécurité“) dont dépendent les politiques d’asile et d’immigration a repris à son compte en 2004, après quelques hésitations et le veto de la Suède, la proposition du Premier ministre de la Grande-Bretagne. Tony Blair, encore lui, en 2003 menaçait que la Grande-Bretagne se retire de la Convention européenne des droits de l’homme, ou encore de la Convention de 1951 sur les réfugiés, pour répondre à des critiques contre la politique d’asile de son pays. En France la „loi Sarkozy“ de novembre 2003 a créé des centres et des locaux de rétention administrative.[1] L’Australie achète des îles pour y installer des camps d’étrangers. La chambre basse du parlement hollandais a décidé le 18 février 2004 d’expulser, dans les huit semaines suivant la décision politique, 26 000 déboutés du droit d’asile et de les conduire dans des camps avant qu’ils ne se décident à partir „volontairement“ ou qu’ils ne soient expulsés de force. Le gouvernement allemand a réadmis sur la territoire de la Serbie,