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Le regard et l’intérêt que les philosophes portèrent au travail se transforma radicalement dès la fin du XVIIIème siècle et au cours du XIXe siècle. Des auteurs tels que Kant, Fichte, Hegel ou encore Nietzsche attestent de ce mouvement. Les réflexions de Hegel et de Nietzsche, aux antipodes l’une de l’autre, méritent une attention toute particulière. Si Hegel contribue à faire du travail un vecteur de reconnaissance sociale, Nietzsche jette le soupçon sur les arrière-pensées des bonnes âmes qui se font l’apôtre d’une glorification du travail au nom de ses vertus économiques et morales.
Hegel et la positivité du travail
Contrairement aux autres penseurs libéraux tels que Locke ou Constant, Hegel souligne l’aspect formateur et libérateur du travail tant sur le plan individuel que sur le plan collectif. Au fil de ses écrits, Hegel considère le travail comme la manifestation concrète de l’essence de l’homme. Le travail est défini par le philosophe allemand comme le produit d’une double médiation : une première médiation entre le désir et la jouissance et une seconde médiation entre le particulier et l’universel. Ces deux dimensions permettent de définir le travail comme une catégorie anthropologique, c’est-à-dire comme une activité qui caractérise l’homme en propre et qui le libère. Dans Le système de la vie éthique, le travail est tout d’abord ce qui différencie le désir de la jouissance. Le travail est une réponse au besoin, mais cette réponse implique de différer la jouissance, de la réfréner. L’être de l’homme suppose le désir, défini comme une tension vers un but qu’on imagine source de satisfaction. En tant que manque, générateur de souffrance, le désir exige sa propre suppression. Tandis que l’animal supprime ses désirs par une jouissance immédiate, l’homme parvient à différer la jouissance par la médiation de son travail. Car si la jouissance supprime l’objet du désir, le travail le