Ponge « l’appareil du téléphone »

644 mots 3 pages
Lorsqu’un petit rocher, lourd et noir, portant son homard en anicroche, s’établit dans une maison, celle-ci doit subir l’invasion d’un rire aux accès argentins, impérieux et mornes. Sans doute est-ce celui de la mignonne sirène dont les deux seins sont en même temps apparus dans un coin sombre du corridor, et qui produit son appel par la vibration entre les deux d’une petite cerise de nickel, y pendante.

Aussitôt, le homard frémit sur son socle. Il faut qu’on le décroche : il a quelque chose à dire, on veut être rassuré par votre voix.

D’autres fois, la provocation vient de vous-même. Quand vous y tente le contraste sensuellement agréable entre la légèreté du combiné et la lourdeur du socle. Quel charme alors d’entendre, aussitôt la crustace détachée, le bourdonnement gai qui vous annonce prêtes au quelconque caprice de votre oreille les innombrables nervures électriques de toutes les villes du monde !

Il faut agir le cadran mobile, puis attendre, après avoir pris acte de la sonnerie impérieuse qui perfore votre patient, le fameux déclic qui vous délivre sa plainte, transformée aussitôt en cordiales ou cérémonieuses politesses… Mais ici finit le prodige et commence une banale comédie.

Francis Ponge est proche des surréalistes. Il veut rénover la langue et refuse un langage purement instrumental, celui qui consiste à la simple désignation des choses. Il est par ailleurs fasciné par l’aspect visuel et sonore des mots. Pour lui, les mots sont des choses : son travail consiste à produire des objets de langage qui soient analogiques aux objets du monde réel. Chez Ponge, le fonctionnement du langage est particulier : le mot n’est pas inséré dans le texte en fonction de son référent mais en fonction des liens graphiques, phonétiques et sémantiques qu’il entretient avec les autres signes. Ponge est un poète artisan.

Étude du poème
Le texte est un poème en prose, structuré en paragraphes. Le texte est surprenant par le registre métaphorique qui concerne un

en relation

  • Philosophie : le langage est-il le meilleur moyen de se faire comprendre ?
    2417 mots | 10 pages
  • Exposé chevalier de la barre
    588 mots | 3 pages
  • Bergson le langage
    260 mots | 2 pages
  • Molière en tragique
    272 mots | 2 pages
  • Le langage trahit -il la pensée
    1407 mots | 6 pages
  • Un roi sans divertissement
    1005 mots | 5 pages
  • Derrière le mot il y a...
    588 mots | 3 pages
  • M Thode Pour L
    9535 mots | 39 pages
  • Entrainement au commentaire
    1130 mots | 5 pages
  • Bergson : le rire
    319 mots | 2 pages
  • Est-il absurde de désirer l'impossible?
    417 mots | 2 pages
  • J. du bellay
    1032 mots | 5 pages
  • Bac es/s 2005 : la poésie
    1135 mots | 5 pages
  • Histoire
    435 mots | 2 pages
  • Un roi sans divertissement
    1642 mots | 7 pages