Sganarelle (dom juan)
Sganarelle, en tant que valet, n'est protecteur de la Foi que par peur de l'au-delà. Présent depuis les premières comédies de Molière, dans cette pièce, il vient en contrepoint apporter de l'humanité et du rire à une pièce qui sans lui aurait été bien noire. Mais le Sganarelle de Dom Juan se démarque des autres valets de Molière ; on peut le qualifier d'asexuel dans la mesure où il ne "récupère" pas les conquêtes de Dom Juan, ce que pouvait faire un valet moliéresque.
Sganarelle mêle souvent les dictons populaires, fait preuve d'un certain bon sens, mais reste assez maladroit. En revanche, l'éloge paradoxal (le célèbre éloge du Tabac, acte I, scène 1) est un procédé littéraire complexe. Il s'adresse à Gusman, le valet de Done Elvire de manière déconcertante : loin de profiter de ce moment d'égalité (en tant que valet), pour s'exprimer dans le patois qui apparaît souvent chez Molière il parle aussi bien que le ferait Dom Juan.
Dans l'acte I, scène 1, Sganarelle précise qu'il déteste son maître mais doit le suivre, plus par lâcheté que par sens moral. On peut néanmoins s'interroger sur les véritables raisons qui le motivent. En effet, il ne cesse d'implorer son maître de se repentir et le menace du châtiment divin. Il y a quelque chose de paradoxal dans son attitude. Sans doute Sganarelle, du point de vue de la société, trouverait dans l'ordre des choses que Dom Juan meure. Il n'en est pas moins fasciné par cet homme d'exception, qui, par sa personnalité, par sa transgression, prend une dimension monstrueuse. Sans doute se demande-t-il jusqu'où Dom Juan peut aller... Ainsi Sganarelle ne souhaite pas vraiment que Dom Juan meure. Pourtant à la mort de ce dernier, il ne le regrettera que parce qu'il lui devait de l'argent, "mes gages ! mes gages", tandis que le Sganarelle "social" justifiera et acceptera la mort de Dom Juan.
Ainsi, loin de s'effacer devant le personnage de Dom Juan, Sganarelle est aussi