Sujet_bac_engagement
1- Pierre Emmanuel [1916-1984], L’Honneur des poètes ( recueil collectif), ©
Éditions de Minuit, 1943, « Les dents serrées »
2-Robert Desnos, C o n t r e e, « La peste » , 1944
3-René Guy Cadou, Pleine poitrine, 1946, « Les fusillés de Chateaubriant »
4-Jean Tardieu, Jours pétrifiés, 1947, « Oradour »
Annexe : Paul Éluard, présentation de l’ouvrage collectif, L’Honneur des poètes
Texte 1-Pierre Emmanuel, L’Honneur des poètes
Les dents serrées
Je hais. Ne me demandez pas ce que je hais
Il y a des mondes de mutisme entre les hommes
Et le ciel veule (1) sur l’abîme, et le mépris
Des morts. Il y a des mots entrechoqués, des lèvres
Sans visage, se parjurant dans les ténèbres
Il y a l’air prostitué au mensonge, et la Voix
Souillant jusqu’au secret de l’âme mais il y a le feu sanglant, la soif rageuse d’être libre il y a des millions de sourds les dents serrées il y a le sang qui commence à peine à couler il y a la haine et c’est assez pour espérer.
1. Qui n’a aucune énergie, aucune volonté, lâche.
2- Robert Desnos, C o n t r é e
[Robert Desnos est mort en déportation en 1945.]
La peste
Dans la rue un pas retentit. La cloche n’a qu’un seul battant. Où va-t il le promeneur qui se rapproche lentement et s’arrête par instant ? Le voici devant la maison. J’entends son souffle derrière la porte.
Je vois le ciel à travers la vitre. Je vois le ciel où les astres roulent sur l’arête des toits. C’est la grande
Ourse ou Bételgeuse, c’est Vénus au ventre blanc, c’est
Diane (2) qui dégrafe sa tunique près d’une fontaine de lumière.
Jamais lunes ni soleils ne roulèrent si loin de la terre, jamais l’air de nuit ne fut si opaque et si lourd. Je pèse sur ma porte qui résiste…
Elle s’ouvre enfin, son battant claque contre le mur. Et tandis que le pas s’éloigne je déchiffre sur une affiche jaune les lettres noires du mot « Peste ».
(www.gallimard.fr)
2. Bételgeuse, Vénus, Diane évoquent des astres et constellations.
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Texte 3- René Guy Cadou, Pleine poitrine, 1946
Les fusillés de