"Les personnages sont dépassés !" nous crie Robbe Grillet. Ainsi pour le chef de file de ce nouveau genre littéraire les personnages traditionnels n'ont pas leur place dans le roman. Cet intellectuel nous scande alors que l'important dans l'histoire c'est... le paysage !? Reprenons. Robbe Grillet attend du nouveau roman que les personnages, leurs caractères et leurs actions soient sacrifiés au profit d'un meuble !? Une fourchette peut être ? Notre révolutionnaire voudrait donc une intrigue décousue, une intrigue incompréhensible et insaisissable ? On comprend mieux le succès phénoménal qu'à connu cette thèse...

Le personnage est le coeur de l'histoire c'est par lui que l'intrigue prend son sens. Emma Bovary de Flaubert n'aurait pas été si touchante sans l'hypocrisie de Rodolphe, sans les velléités qui la grandissaient sans les rêves de princesse qui l'habitaient. Il faut donc pouvoir se retrouver dans le roman et comprendre le personnage pour s'identifier à lui. L'attachement que nous portons au personnage nous pousse à lire la suite. Cette affection que nous avons ressenti on s'en souvient toute notre vie lorsqu'un personnage nous a marqué. Cette affection, cet attachement aurait il la même force dès lors que nous ne parlons plus d'un personnage mais d'une cuillère ? d'une chaise ? J'en doute...

Le personnage peut aussi être utilisé à des fins de description de la société. Je pense à Thérèse Raquin et il est bien entendu qu'éprouver de la tendresse pour un personnage adultère meurtrier apparaît comme une évidence moins flagrante d'autant plus qu'elle se fait avorter en cherchant les coups de son compagnon. Enfin Zola n'attendait sûrement pas des soupirs de contentement mais l'histoire possède bien une intrigue vivante du fait de personnages aux caractéristiques étudiées et révélées.

Pour terminer je dirai que Robbe Grillet sacrifie la notion de plaisir de lecture, de fluidité de l'intrigue au profit d'une révolution romanesque attendue par lui