Mon amour,

Pas un jour ne passe sans que je ne pense pas à toi. Ici, il fait froid, j'ai faim et j'ai peur.
Mes vêtements sont sales, déchirés et trempés par la pluie. Je ne ressemble plus à grand-chose si ce n'est qu'à une misérable. J'avance en titubant, luttant pour rester debout. J'ai du mal à regarder devant moi tellement mes yeux sont rougis par le froid, la poussière et les larmes. Mon corps est frêle et glacé. J'ai les pieds cornés à force d'avoir marché pour fuir, pour éviter d'être battue, humiliée, tondue.
Maintenant que je suis à paris, je suis seule, simple inconnue errant pieds nus dans les rues, cherchant en vain un bout de viande ou un morceau de pain pour ne pas mourir de faim. Si cela ne tenait qu'a moi, je me laissrai mourir, j'abandonnerai ce calvaire. Mais il y a lui, cette petite vie qui bouge dans mon ventre. C'est ça qui me donne la force de continuer, d'avancer quoi qu'il arrive.
S'il te plaît ne m'en veut pas si je cache son histoire à notre enfant. Je la lui revêlerai un jour mais pour l'instant j'ai peur pour lui. Je ne veux pas qu'il subisse l'humiliation pour la simple et bonne raison que nous nous sommes aimés, nous qui n'avons pas choisi la guerre.
J'aurais voulu parler, raconter tout ça mais je ne le peux pas. Alors je pose les mots sur ce papier tandis que je ravale mes larmes, enroulée dans mes guenilles. Ce soir je dormirai une fois de plus sous les ponts, réchauffant mon ventre rond avec mes mains pour le protéger.
Je ne regrette rien, seulement que l'amour ne soit jamais vainqueur du