L'art est-il un luxe ?

Le luxe est le contingent, le superflu, cette notion qui s’oppose à la nécessité et meurt dans le besoin. Prémices de la luxure, cette décadence qui se vautre dans l’inutilité et la débauche de vide (de morale, de sens), le luxe se définit souvent par l’excès et par son prix. La nécessité du luxe de renouer avec la valeur symbolique, au-delà de l’étiquette du prix, participe de cette relation renouvelée avec l’art et la création. Si définir le luxe en ces quelques mots paraît réducteur, définir l’art est encore plus malaisé. L’art est-il d’abord l’ars défini par le Gaffiot, talent, savoir-faire, connaissance technique ; est-ce l’art de l’artiste au sens de la création géniale ; est-il un luxe de par son prix, de par sa rareté ; est-il un luxe car difficilement accessible au commun des mortels car disposant de ses propres codes, de son propre langage ? La question « l’art est-il un luxe ? » interroge l’ontologie de l’art, sa valeur et sa fonction. Si l’art est un luxe, c’est-à-dire qu’il se manifeste en dehors du nécessaire, alors est-il superflu et contingent ? Si l’art se plie aux lois d’une minorité, de l’argent, d’un marché, cela ne préfigure-t-il pas sa mort ? L’art enfin, pour être art, ne doit-il pas être libre ? Les paradoxes qui structurent la relation entre art et luxe naissent des paradoxes inhérents à l’art. Définir l’art et le luxe plus en avant en adoptant la position de la doxa, postulant que l’art est effectivement un luxe nous permettra de révéler ces paradoxes. Mais nous établirons que l’art est en fait nécessaire et que lorsqu’il est trop contraint, trop défini par des règles, il est travesti et perd sa valeur artistique pour devenir un faire-valoir ou tomber dans le vulgaire agrément de salon. Enfin nous discuterons la nécessité absolue pour l’art d’être libre pour demeurer art et nourrir de sa valeur le monde, les hommes et le luxe.

Toute question interrogeant l’ontologie questionne le sens des concepts