Accident du travail

3031 mots 13 pages
R IE H CA

Suicide et travail
Axel Hoffman, médecin généraliste à la maison médicale Norman Bethune
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Dans l’article précédent, nous avons examiné les réactions face à un suicide au travail. Avec C. Dejours et F. Bègue, dont nous tirons l’essentiel de la présente réflexion, voyons maintenant comment le management néolibéral déstructure le monde du travail et s’attaque à ce qui constitue l’identité du travailleur, pouvant le mener ainsi à commettre l’irréparable.
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Les difficultés personnelles ou les injustices et les violences au travail ont toujours existé. Pourtant, dans le passé, il ne semble pas que ces situations menaient aussi fréquemment à un suicide sur les lieux de travail. Deux mécanismes souvent efficaces protégeaient les travailleurs contre l’évolution vers la dépression. Dans les milieux de travail, traditionnellement tenus par des hommes, se déployaient des stratégies de défense élaborées collectivement : la souffrance y était considérée comme dérisoire, le courage, l’endurance, l’indifférence à la douleur étaient les seules attitudes dignes d’un homme, la peur ne pouvait toucher que les personnalités efféminées et méprisables. La seule manière d’échapper à la honte de ses faiblesses et de ne pas perdre son appartenance à la communauté de travail était de médicaliser les plaintes (ce mécanisme a mené entre autres à l’élaboration du syndrome subjectif post-commotionnel). En outre, des conduites d’entraide et de solidarité se déployaient autour du collègue en souffrance, le collectif de travail remplissait une fonction de prévention des décompensations.

Le rapport entre le suicide et le travail
Les suicides et tentatives de suicide sur les lieux du travail apparaissent à partir des années 90. Auparavant, le phénomène était surtout décrit chez les petits exploitants agricoles menacés de faillite et chez les salariés agricoles, soumis à des conditions de

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