Agrippa
" Tu vois, juste vengeur, les fleaux de ton Eglise,
Qui, par eux mise en cendre et en masure mise,
A, contre tout espoir, son espérance en toy,
Pour son retranchement, le rempart de la foy.
Tes ennemis et nous sommes esgaux en vice,
Si, juge, tu te sieds en ton lict de justice ;
Tu fais pourtant un choix d'enfans ou d'ennemis
Et ce choix est celuy que ta grace y a mis.
Si tu leur fais des biens, ils s'enflent en blasphemes,
Si tu nous fais du mal, il nous vient de nous mesmes ;
Ils maudissent ton nom quand tu leur es plus doux ;
Quand tu nous meurtrirois, si te benirons-nous.
... Veux-tu long-temps laisser en cette terre ronde
Regner ton ennemy ? N'es-tu seigneur du monde,
Toy, Seigneur, qui abbats, qui blesses, qui gueris,
Qui donnes vie et mort, qui tüe et qui nourris ?
Les princes n'ont point d'yeux pour voir ces grand' merveilles ;
Quant tu voudras tonner, n'auront-ils point d'oreilles ?
Leurs mains ne servent plus qu'à nous persecuter ;
Ils ont tout pour Satan, et rien pour te porter.
Sion ne reçoit d'eux que refus et rudesses,
Mais Babel les rançonne et pille leurs richesses ;
Tels sont les monts cornus, qui (avaricieux)
Monstrent l'or aux enfers et les neiges aux cieux.
Les temples du payen, du Turc, de l'idolatre,
Haussent au ciel l'orgueil du marbre et de l'albastre,
Et Dieu seul, au désert pauvrement hebergé,
A basti tout le monde et n'i est pas logé !
Les moineaux ont leurs nids, leurs nids les hyrondelles ;
On dresse quelque fuye aux simples colombelles ;
Tout est mis à l'abry par le soing des mortels,
Et Dieu, seul immortel, n'a logis ni autels ;
Tu as tout l'univers, où ta gloire on contemple,
Pour marchepied la terre et le ciel pour un temple,
Où te chassera l'homme, ô Dieu victorieux ?
Tu possedes le ciel et les cieux des hauts cieux ?
Nous faisons des rochers