Commentaire littéraire : l'île des esclaves
La littérature a souvent été utilisée par les auteurs pour argumenter, défendre leurs idées ou décrédibiliser la thèse adverse. Au théâtre, la double énonciation et la mise en scène permettent de renforcer cette capacité argumentative. Ainsi, dans la pièce de Marivaux L'Île des esclaves, deux maîtres, Iphicrate et Euphrosine et leurs valets respectif Arlequin et Cléanthis font naufrage sur l’île des esclaves. Ils ne tardent pas à rencontrer Trivelin, le maître de l’ile qui décide inverser les rôles entre esclaves et maîtres pour punir les mauvais traitements subis par les esclaves. Quels sont les enjeux de la scène II, dans laquelle Cléanthis fait le portrait de son ancienne maîtresse devant Trivelin et Euphrosine ? Nous analyserons tout d’abord la mise en abîme du théâtre dans le jeu de Cléanthis, et l’aspect satirique de la scène.
Dans son portrait d’Euphrosine, Cléanthis joue son rôle pour ses spectateurs, il y a donc un « jeu dans le jeu ». Dans cette scène, il y a très peu de didascalies, une très grande liberté de mise en scène, mais il est possible pour le lecteur de s’imaginer les mimiques exagérée de Cléanthis, car elle parodie sa maîtresse.
Pour l’actrice qui doit jouer Cléanthis, les rôles se multiplient : elle doit tantôt jouer Cléanthis qui critique Euphrosine, tantôt le rôle de Cléanthis avant le naufrage, et parfois même celui de certaines amies d’Euphrosine : « Madame au contraire a-t-elle mal reposé ? Ah ! Qu’on m’apporte un miroir […] Comment vous portez-vous, Madame ? Très mal, Madame, j’ai perdu le sommeil » . Ainsi, le fait qu’elle doive changer constamment de rôle et donc de ton et de gestuelle, apporte beaucoup de vivacité à la scène et renforce son aspect comique. Le renversement de situation sociale entre Cléaqnthis et Euphrosine est représenté par la prise de parole : Cléanthis, nouvelle maîtresse, la monopolise tandis qu’Euphrosine, désormais son esclave, n’a que quelques rares et très courtes répliques, coupées par