Si le fait d’adapter un livre au cinéma est une pratique relativement courante de nos jours, adapter à l’écran une pièce de théâtre, tout en gardant son texte exact, se fait moins. C’est pourtant ce qu’Alain Resnais se prend à faire en 2012, en sortant son film Vous n’avez encore rien vu, qui prend pour modèle la pièce de Jean Anouilh, Eurydice, parue une soixantaine d’années auparavant. Ces deux œuvres tournent évidemment autour du même mythe, celui d’Orphée et Eurydice. Pendant toute la durée du film, Resnais tente de s’approprier la pièce d’Anouilh, cela par différents procédés. Si l’on trouve plusieurs formes de réécritures du mythe par Anouilh et Resnais, le rapport qu’entretient Resnais avec le mythe est très controversé ; mais le cinéaste s’adonne finalement à rendre différents hommages. Concernant les deux auteurs, il va de soi que l’on peut affirmer qu’ils font une réécriture. Mais de quelle réécriture parler ; car, si pour Anouilh il est évident qu’il donne une réécriture pourrait-on dire classique du mythe, l’évidence n’est pas là pour Resnais, qui, à travers le mythe, donne en fait une réécriture de la reprise du mythe d’Anouilh. Eurydice d’Anouilh est l’exemple même d’une réécriture d’un mythe : en effet elle joue avec la modernisation de l’histoire d’Orphée et Eurydice, tout en faisant une sorte de clin d’œil à l’ancienneté. Tout mythe est une fable qui met en forme tout ce qui définit une personne, tout ce qui exprime sa spiritualité. C’est de ce principe que part Anouilh, qui donne sa propre version du mythe en y confrontant sa réalité, ses angoisses, ses préoccupations. Anouilh associe donc le mythe à sa réalité, à son propre imaginaire, et fait apparaitre l’universalité de l’histoire, qui touche à des questions que chacun se pose. En bref, Anouilh fait comme l’ont fait de nombreux auteurs avant lui : il donne sa vision de l’histoire, tout en gardant un rapport très étroit avec le mythe original. Contrairement à l’écrivain qui offre une