Le corpus proposé comprend cinq textes d'époques et de genres variés avec des extraits tirés de l'ouvrage de La Bruyère, Les Caractères ou les Mœurs de ce siècle (1688), de la Lettre à Louis XIV (1693) de Fénelon, homme d'église contemporain du précédent, d'une intervention de Victor Hugo à la tribune de l'Assemblée nationale (1850), d'un poème d'Arthur Rimbaud composé en 1870 et enfin d'un roman de Zola intitulé L'Assommoir.
Tous ces textes dénoncent la misère du peuple des campagnes et des villes, d'épouvantables conditions matérielles d'existence, des conditions de travail inhumaines, des logements insalubres et sordides, la famine effroyable, qui semblent traverser les siècles. On peut relever dans l'ensemble de ces textes des procédés rhétoriques, des procédés de style qui renforcent la tonalité pathétique. On peut d'abord étudier le recours fréquent aux comparaisons et aux métaphores, dans les textes de La Bruyère, de Victor Hugo, de Rimbaud et de Zola. Le texte de La Bruyère, moraliste du Siècle d'Or, est bâti essentiellement sur la métaphore filée de l'animal. L'assimilation des êtres humains à des animaux ménage un effet de surprise produit sur le lecteur. C'est seulement au milieu de la longue phrase que le lecteur découvre que La Bruyère décrit des humains : « ils montrent une face humaine, et en effet ils sont des hommes. ». Les métaphores animales, l'animalisation des êtres humains que l'on relève dans certaines expressions (« animaux farouches », « des mâles et des femelles », « la terre qu'ils fouillent », « des tanières »), font comprendre que ces paysans qui vivaient sous le règne de Louis XIVavaient des conditions de vie atroces, qui les rapprochent des bêtes affamées. Il est frappant de retrouver l'emploi du mot « tanière », métaphore s'appliquant aux logements des ouvriers, dans le Discours de Victor Hugo, un siècle et demi plus tard; comme si l'Histoire stagnait, comme si la misère, niant la dignité humaine, restait au fond toujours