Discours de la servitude volontaire, La Boetie
Etienne de La Boétie. Le discours de la servitude volontaire. 1549. « Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux ». Cette phrase, attribuée à Etienne de La Boétie, semble donner le ton au réquisitoire contre l’absolutisme que constitue Le discours de la servitude volontaire, rédigé en 1549. Humaniste, La Boétie réhabilite le genre du discours à la manière des orateurs antiques, en utilisant la rhétorique comme outil de liberté : il élabore ainsi une réflexion très originale pour son époque, via un texte virulent (même si cela est atténué par l’emploi d’exemples uniquement tirés de l’Antiquité afin de protéger son auteur), avec peu d’occurrence de Dieu dans la réflexion sur le pouvoir, et pose ainsi des problématiques nouvelles. L’extrait présenté, situé au début de l’œuvre, énonce, sous la forme d’un discours argumentatif, tout le paradoxe que représente la « servitude volontaire », et semble répondre à certains des questionnements sous-jacents du discours, à savoir l’origine du pouvoir du tyran, et par quels moyens se détacher de ce tyran dans l’optique de recouvrer la liberté. Comment La Boétie fait-il un réquisitoire non pas contre le tyran, mais contre ses sujets, victimes consentantes de la servitude volontaire, et les exhorte-t-il à retrouver leur liberté ?
Pour répondre à ces questionnements, nous procéderons ici à une analyse linéaire du texte.
Le texte s’ouvre par une exclamation, vantant le caractère prodigieux de la liberté (thème introduit ici et par ailleurs omniprésent dans le texte), capable de transcender les esprits, de les pousser à la « vaillance » (comprendre : à être des combattants valeureux prêts à sacrifier leurs vies pour elle). Par une telle exclamation, et comme le montre l’emploi du terme « miraculeux » (l.1) (acte surnaturel, attribué à une puissance divine, et donc qui s’oppose au quelconque, à l’ordinaire des hommes), l’auteur se veut ironique : une rupture va avoir lieu dans le