Démocratie et développement
Depuis le lancement des réformes, il y a plus de 20 ans, la Chine a connu de profonds changements économiques et sociaux. Elle s'est modernisée, son économie a connu des taux de croissance très rapides et fonctionne partiellement sur un mode « capitaliste ». Pourtant, de façon surprenante, son régime politique est resté fondamentalement le même. Le Parti communiste dirige toujours la Chine, selon des méthodes héritées de Lénine, Staline et Mao Zedong, mais adaptées par Deng Xiaoping, à la fin des années 1970. Pour des raisons d'efficacité économique, le pouvoir a alors laissé plus d'initiative aux acteurs sociaux et, n'ayant plus la prétention utopique de former « l'homme nouveau », il s'est en partie retiré de la vie privée des citoyens. Il a également accordé un peu plus de liberté aux intellectuels, aux écrivains et aux artistes. Il a cependant conservé l'essentiel des institutions existantes de contrôle des idées, des personnes et des groupes : propagande, censure, certificat de résidence, dossier personnel, prise en charge complète de chacun par son unité de travail, etc.
La thèse dominante : de la supériorité des régimes autoritaires à assurer le développement économique
La croyance qu’un gouvernement autoritaire est mieux outillé pour promouvoir la croissance économique et le développement dans les pays à faible ou moyen niveau de revenu s’intègre dans une large tradition intellectuelle. Cette vision a dominé le monde intellectuel et a servi à orienter la politique étrangère américaine durant les années de la guerre froide. Au moment où Seymour Lipset publiait son fameux article1 et mettait en exergue les conditions économiques et sociales favorables à la démocratisation politique, d’autres auteurs s’évertuaient à montrer que la dictature était l’inévitable prix du développement.
Walter Galenson2 soutenait que « plus démocratique est un gouvernement, plus grande est la diversion de ressources de l’investissement vers la consommation ». Et