ECJS
LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ET SES LIMITES
Notre colloque porte pour titre : « société démocratique et droits de l’homme ».
Il me revient de traiter le sujet de la liberté d’expression et de ses limites.
Qu’il me soit permis, pour commencer, de dire la joie et l’émotion que je ressens à prendre la parole sur cette terre de Grèce, notre mère à tous. Pierre Lambert a magnifiquement rappelé que disserter de la démocratie, c’est parler et penser grec. On peut voir, sans abus, dans le sycophante (l’accusateur public) l’ancêtre de nos journalistes d’investigation ; dans le kômos, l’initiateur de la comédie moraliste et, par ses outrances, des caricaturistes politiques les plus impertinents.
Mais l’on doit aussi à la sagesse grecque l’idée d’un ordre du droit auquel le souverain lui-même ne peut que se soumettre à peine de devenir un tyran illégitime.
Cette idée fondatrice qu’exprime Antigone opposant à Créon la loi immuable des dieux a fécondé un ordre juridique universel instituant la personne humaine comme source et comme finalité du droit. Les déclarations américaine et française, universelle et européenne, des droits de l’homme sont filles de cette héroïne que tous les démocrates revendiquent comme une aïeule sacrée.
La liberté d’expression, conçue comme un attribut essentiel de la liberté de toute personne humaine – celle d’exprimer une pensée – est inséparable de l’ambition démocratique. Les journalistes en sont les serviteurs privilégiés et les porte-drapeaux. Ils méritent notre soutien à chaque fois qu’un arbitraire prétend leur couper la langue, écraser leurs plumes, réduire en pièces leurs rotatives, voire leur retirer la liberté ou même la vie.
La Cour européenne des droits de l’homme a souligné le rôle de la presse, qualifiant les journalistes de « chiens de garde de la démocratie », dès lors qu’elle fournit des informations sérieuses sur des questions d’intérêt général (CEDH Goodwin c/ Royaume-Uni du 27 mars 1996,