J’étais à présent dans le coche pour Amiens, une ville qui ne représentait pour moi que le couvent où mes parents m’envoyaient, ce couvent qui était pour moi le symbole d’une nouvelle vie, et donc d’une mort. J’acceptais sans autre possibilité, le sort fatal de la vie religieuse qui s’abattait sur moi. Tout cela était arrivé si vite, aussitôt que mon père avait pris connaissance de ma relation avec Charles, que je me retrouvai dans ce bloc de bois exigu qui transportait quelques femmes légèrement plus âgées que moi, qui elles, se sentaient appelées par la voix du Seigneur. Quand les chevaux eurent cessé de faire trembler cette longue calèche du désespoir, la porte s’ouvrit et j’aperçu l’hôtellerie d’Amiens, qui était un bâtiment assez beau, avec de petites portes d’acajou. Mais mon observation fût vite arrêtée, par le groupe féminin qui s’empressait de sortir, je les suivis rapidement et une fois dehors, M. Taquecin commença à retirer mes sacs des paniers pour les poser au sol. La place de l’hôtellerie, une fois désertée par le coche et les religieuses, paraissait terriblement vide ; deux jeunes hommes, à peine plus âgés que moi, étaient là, m’observant afférée à mon équipage. Le plus grand s’approcha de moi, laissant l’autre seul, et me présenta ses politesses avec une légère maladresse masquée par un débit de paroles important. Cela m’amusait, mais je restais indifférente face à son discours enflammé, trop préoccupée par la suite de ma vie, ou plutôt la fin, qui sonnerait soudainement lors de mes premiers pas dans le cachot social qu’était le couvent. Le jeune homme me poussa à lui expliquer ma venue. L’explication fournie par mes soins décomposa son visage comme si je lui avais annoncé le décès de sa mère. J’en déduisis rapidement l’effet que la jeune fille que