Erwin Wurm Revue Parachute
ERWIN WURM L'ART DU SOUPÇON
Elisabeth Wetterwald
In PARACHUTE n°105 – « autofictions » (2002)
Marqué par l'art minimal et l'art conceptuel, le travail d'Erwin Wurm, d'abord relativement immatériel, en tout cas désincarné, se présente comme la progressive et presque inexorable apparition de la figure humaine. D'abord évoqués par des vêtements vides, puis enfouis sous des vêtements, utilisés comme du matériel mouvant, la figure et le corps humain ont ensuite fait leur apparition pour constituer aujourd'hui les motifs essentiels de l'œuvre. Wurm, lui-même, a souvent utilisé son propre corps dans ses travaux, et une de ses plus récentes séries photographiques n'est constituée que d'autoportraits. Le corps est-il encore considéré comme matière sculpturale ou bien s'est-il entre temps chargé d'affects et d'une épaisseur psychologique qui lui étaient jusqu'alors refusés ? L'artiste s'est-il définitivement éloigne du radicalisme minimaliste pour nous livrer quelque chose de lui-même, de sa propre personnalité ? Ou bien, au contraire, joue-t-il avec les codes de représentation du moi pour montrer que ce dernier n'est que pure construction imaginaire ?
Représenter l'absence
À la fin des années 1980, Erwin Wurm réalise ses premières sculptures de poussière . Des pièces sans titre, le plus souvent, qui évoquent de facon très minimale des formes d'objets -- qui ont sans doute été exposés puis retirés -- par la trace qu'ils ont laissée sur un support, le reste de la surface étant recouvert d'une couche de poussière. Le visiteur n'appréhende l'objet que dans la mesure ou il n'est plus là, et c'est son environnement (la poussière en l'occurrence) qui le projette dans son imagination. Présentées à l'intérieur de caissons en verre, comme protégées, ou bien laissées à l'air libre, sur des socles, de simples planches de bois, par terre, ou bien encore dans la rue, ces pièces pouvaient être considérées, dans certains cas, comme une