Lorsque le Dom Juan de Molière désire une femme, il déploie une stratégie de séduction à laquelle elle finit par succomber. Tout se passe comme si son désir, son souhait était en même temps une volonté impérieuse ne souffrant aucun obstacle et ne s’embarrassant d’aucune morale pour s’assouvir. Or dans Dom Juan choisit-il de désirer toutes les femmes ou alors est-il le jouet de sa passion amoureuse ? Peut-on dire qu’il a choisi d’être ainsi et, par conséquent, de mourir tragiquement, ou bien n’a-t-il fait que céder à l’attrait de son désir ? En effet, désirer et vouloir est-ce identique ? Parce qu’ils sont apparemment semblables le sont-ils en réalité ? Lorsque nous souhaitons quelque chose, nous y investissons-nous de la même manière que lorsque nous le choisissons ? Et dans cette distinction, n’y a-t-il pas toute la différence entre une existence choisie et une vie rêvée, une pratique de l’action et une soumission au désir ? Cet extrait de L’Ethique à Nicomaque d’Aristote définit les propriétés respectives du choix et du souhait. Tout d’abord, en déterminant le type d’objet, possible et impossible, vers lesquels ils se portent. Puis les degrés d’engagement que chacun réclame, selon que leur succès dépend ou non de nous. Enfin, grâce à la distinction ultime entre les moyens et la fin, Aristote établit l’enjeu d’une éthique, ce qui indique, pour chacun de nous, ce que nous devons faire et choisir pour accéder au bien.

Dans un premier temps (lignes 1-5), Aristote établit une distinction d’ordre général qui délimite le choix du souhait, selon qu’ils se projettent sur des objets possibles ou impossibles. Le choix porte sut des choses possibles, c’est-à-dire réalisables, qui relèvent des capacités humaines, ce pour quoi on peut mettre en œuvre un ensemble d’actions et de procédures qui , si elles sont correctement effectuées, seront couronnées de succès . Certes, choisir dans l’ordre du possible ne signifie pas que nous y parviendrons nécessairement,