Exude rural
Ville et campagne: paradoxes et contradictions du système socio-économique de l’Espagne de la seconde partie du XVIIIe
Marc Marti, , Université de Nice, CIRCPLES, EA 3159
Introduction Le XVIIIe siècle est pour l’Espagne le siècle de la reprise, où selon les termes de Pierre Vilar «les facteurs de décadence s’effacent1». Dans la deuxième partie du siècle, l’essor économique amorcé plusieurs dizaines d’années auparavant va mettre à jour et amplifier des paradoxes et des contradictions dans le système socio-économique. Il est évident que la plupart de ces phénomènes existaient ou étaient latents lors des années précédentes, mais ils se retrouvent propulsés au premier plan lors de la période que nous nous proposons ici d’analyser. La poussée démographique servira de point de départ, à la fois cause et conséquence de l’essor. Elle va créer de nouveaux équilibres régionaux et modifier la morphologie des centres urbains. Un courant migratoire de la campagne vers la ville va s’établir. Mais rapidement, cette immigration va poser problème: sécurité publique, pratique de la charité seront remises en cause. Les explications du mouvement migratoire sont cependant ailleurs, profondément enracinés dans un monde rural et une agriculture où dominent des structures inégalitaires, génératrices de pauvreté. Une inégalité qu’amplifiera la conjoncture économique, pourtant favorable à l’essor de la production agricole. En effet, cet essor bénéficie en dernier ressort à la minorité privilégiée et propriétaire et donc à la ville, grâce à des mécanismes monopolistiques de commercialisation —en partie de fait et en partie de droit. Les ministres éclairés essaieront cependant de briser ce processus en supprimant la taxation du blé et en décrétant le libre commerce. L’échec sur le terrain de la mesure illustre parfaitement les paradoxes du système socio-économique de cette fin du XVIIIe. 1. L’essor démographique et ses particularités 1.1. Le poids du nombre La période se caractérise