Faim dans le monde-2006.pdf
(avril 2006) Cliché: « Donnons à manger à ceux qui ont faim ». Les médias et le discours ambiant considèrent généralement le problème de la faim comme le triste apanage de populations laissées hors du mouvement de la modernité, incapables de se prendre en charge, dotées de techniques trop rudimentaires pour faire face aux aléas climatiques ou à la pression démographique, victimes de guerres et de déplacements. La sousalimentation est donc le résultat d’événements naturels incontrôlables – sécheresses, inondations, etc. – et de causes internes à ces sociétés, des conduites archaïques ou irrationnelles. Ces populations n’étant pas à même de subvenir à leurs besoins, ce serait à nous, dépositaires de moyens et de connaissances scientifiques et techniques de leur venir en aide, mais aussi et surtout de les « éduquer », non seulement de leur « donner un poisson », mais de leur « apprendre à pêcher »… Il est indispensable de rompre avec ces représentations, misérabilistes dans leur diagnostic et paternalistes dans leurs démarches, pour faire véritablement face à la problématique de la sous-alimentation, à ses déterminants, ses causes et ses dimensions. Nous allons voir qu’elle ne dépend pas seulement de solutions techniques ou financières, mais qu’elle est étroitement liée à des rapports de pouvoir, à l’intérieur des nations et entre les nations. La sous-alimentation chronique des campagnes Une information avancée par la FAO, l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et de l’agriculture, devrait nous aider à mieux cerner le phénomène. Dans l’avant-propos de son rapport 2005 sur « L’état de l’insécurité alimentaire dans le monde », la FAO prévient que « 75 pour cent des populations affamées de la planète vivent dans les zones rurales », et que pour réduire la faim, « il faut accorder la priorité aux zones rurales et à l’agriculture, qui est le principal soutien des moyens d’existence en milieu rural ». La faim est donc étroitement liée à