Femme dans l'hostoire
S'il ne viendrait à l'esprit de personne de s'interroger sur la condition masculine, celle des femmes, en revanche, soulève un certain nombre d'interrogations. Les femmes ont en effet souffert de ce que Pierre Bourdieu qualifie dans l'ouvrage du même titre de la domination masculine. Le terme de condition renvoie dans la philosophie existentialiste à celui d'essence ou de nature. De même qu'on s'interrogeait dans les années 1950 sur la question de la nature humaine, on peut s'interroger sur l'existence d'une essence féminine, c'est-à-dire d'une identité féminine intangible. Sartre, dans L'existentialisme est un humanisme, remarque que « s'il est impossible de trouver en chaque homme une essence universelle qui serait la nature humaine, il existe pourtant une universalité humaine de condition. Ce n'est pas par hasard que les penseurs d'aujourd'hui parlent plus volontiers de la condition de l'homme que de sa nature ». Parler de condition féminine, c'est donc prendre position en défaveur des thèses naturalistes, essentialistes, postulant l'existence d'un éternel féminin. C'est cette position que soutient également Simone de Beauvoir, en affirmant dans Le Deuxième Sexe qu'on devient femme, et que cette identité relève largement d'un fait culturel (et non inné), sociologique (et non biologique), produit d'une longue évolution historique.
On ne naît pas femme : on le devient. Aucun destin biologique, psychique, économique ne définit la figure que revêt au sein de la société la femelle humaine ; c'est l'ensemble de la civilisation qui élabore ce produit intermédiaire entre le mâle et le castrat qu'on qualifie de féminin. Seule la médiation d'autrui peut constituer un individu comme un Autre. En tant qu'il existe pour soi, l'enfant ne saurait se saisir comme sexuellement différencié. Chez les filles et les garçons, le corps est d'abord le rayonnement d'une subjectivité, l'instrument qui effectue la compréhension du monde : c'est à travers les