Fiche lecture 80% au bac...et après
Stéphane BEAUD
L’accroissement des taux de scolarisation par âge est associé à une augmentation des écarts sociaux d’accès dans les différentes filières considérées. Ce qui signifie concrètement que, si la part des élèves de catégories populaires est globalement croissante dans chaque filière de l’enseignement secondaire, cette croissance se révèle en fait beaucoup plus forte dans les séries de bac populaires (bac G). Si bien que les écarts sociaux augmentent de manière relative.
L’élimination scolaire des catégories défavorisées a été moins visible, parce que le processus s’est décalé dans le temps et touche dorénavant l’enseignement secondaire et le premier cycle de l’enseignement supérieur. Au moment même où s’ouvraient largement les accès à l’enseignement long des lycées, la hiérarchisation sociale des filières se creusait fortement. Le fossé s’est aussi creusé durant cette période entre les lycées du centre-ville et ceux de la périphérie.
Cette politique des 80% de bacheliers se traduit donc par un accès massif aux études longues des enfants de milieux populaires notamment d’origine ouvrière. Le mot d’ordre des « 80% au bac » a souvent été pris au pied de la lettre tant par les parents que par les enfants, c’est-à-dire comme ouvrant grand les portes du lycée général. En fait, il y a un malentendu persistant autour de ce slogan car il incluait bien évidemment le bac professionnel qui venait d’être créé. Telle qu’elle a été interprétée, cette nouvelle donne scolaire a contribué à ancrer dans la tête des parents la certitude que leurs enfants avaient aussi droit à la poursuite d’étude, qu’il s’agissait d’une nouvelle revendication égalitaire, d’une sorte de conquête sociale (le lycée, c’est aussi pour nos enfants).
Cette réinterprétation du slogan ministériel par les familles populaires doit être situé dans le contexte des deux dernières décennies. Ces années là étaient marquées à l’usine et dans les métiers tertiaires