Gauvain à la frontière entre conscience et inconscience
Alors qu’il vient de combattre le neveu de Greorreas, Gauvain s’aperçoit de la disparition de la demoiselle au miroir qui le suivait jusque là. Cette séparation le pousse à une nouvelle rencontre, le nautonier, qui incarne l’étape transitoire qu’effectuera notre héros de la vie à la mort. Il franchira ainsi la rive et se retrouvera dans le château enchanté, c’est là qu’intervient l’intérêt du passage, car si Gauvain traverse la rive, le doute plane, est ce par simple mégarde qu’il se retrouve plonger dans l’autre monde, ou choisit-il délibérément d’accepter le destin qui semble être le sien au sein du récit ?
En premier lieu, je vais tenter de mettre en avant les aspects qui portent à croire que c’est avec une inconscience et sans sa volonté que Gauvain se retrouve pris dans sa propre mort.
Tout d’abord, il semble légitime de penser que Gauvain n’arrive plus à s’orienter dans son itinéraire qui est [illogique] . En effet, l’on remarque que ses dernières aventures n’ont pour objet commun que sa présence, il passe d’un endroit à l’autre, mêle rencontre et adieux, sans qu’il n’y ai de lien géographique qui relie ce cheminement, qui par ailleurs recul plutôt qu’il n’avance. Cela étayerait donc l’hypothèse qui consiste à penser qu’ [il glissera dans l’Autre Monde, toujours persuadé qu’il voyage].
Ensuite, l’on remarque que Gauvain ne prête pas attention aux indices qui pourrait éveiller un doute chez lui. Lorsque le nautonier dit (Conte du Graal, vv. 7316-7320):
« Chevalier, por que jo se seusse,
Que je lo cheval n’an eusse,
Et se je lo cheval n’an oi,
Au chevalier faillir ne poi. »
La répétition double des termes chevaliers et cheval, sans désignant précis, indique une généralité répétée. L’ambiguïté apparaît, le nautonier réclame-t-il le neveu de Greorreas, ou Gauvain lui-même ? En effet, l’on sait que le cheval lui appartient, alors il ne semble pas inapproprié de penser que c’est bien