Jeunes délinquants entre éducation et punition
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JEUNES DÉLINQUANTS ENTRE ÉDUCATION ET PUNITION
Le fantôme des maisons de redressement
Sans attendre, le ministre français de l'éducation, M. Luc Ferry, et celui de l'intérieur, M. Nicolas Sarkozy ont annoncé la création de centres fermés pour les adolescents. Comme si l'on pouvait éduquer un délinquant en l'enfermant. Depuis le XIXe siècle, toutes les expériences d'internement ont échoué. En fait, les lois ont oscillé entre peine et éducation, suivant le regard porté sur les jeunes, parfois considérés comme des enfants coupables à punir plutôt que comme des enfants victimes à protéger et à insérer.
Quand on parle de protection de l'enfant, s'agit-il de se protéger contre le jeune plutôt que de le protéger de lui-même ? Ce débat jalonne l'histoire de l'intervention auprès des mineurs où la tentation des centres fermés réapparaît régulièrement... Dès la Révolution française, la législation est centrée sur la peine éducative et prévoit des maisons d'éducation correctionnelle dont les premières apparaîtront sous la Monarchie de juillet (1830-1848). En attendant, les jeunes resteront en prison, mêlés avec les adultes. En 1836, dans le souci de séparer les mineurs des majeurs sera ouverte la maison d'éducation correctionnelle de la Petite-Roquette à Paris, inspirée d'un modèle américain rapporté par Tocqueville en 1831. C'est une prison cellulaire pour mineurs délinquants, vagabonds et enfants relevant de la Correction paternelle (1). Dans un premier temps, on y privilégie le régime cellulaire la nuit, et dans la journée les jeunes détenus travaillent en silence en atelier, ils reçoivent une instruction élémentaire et religieuse. Le voeu du législateur de 1791 est réalisé : lier la peine à l'éducation. Pourtant, très vite, la Petite-Roquette évoluera vers l'encellulement intégral, jour et nuit. Dans une conception très religieuse, l'isolement et le silence apparaissent comme des gages d'amendement destinés à favoriser « le