Jour de rentrée
Au premier coup de huit heures , sonnant à la grande horloge du bâtiment-maîtres , les maîtres qui se promenaient gravement dans la cour frappèrent dans leurs mains ; aussitôt les anciens , qui jouait un peu en attendant l’heure cessèrent brusquement de jouer , et , comme une volée de moineaux , vinrent s’abattre sur deux rangs , les petits devant sur un rang , et les grands derrière , sur un rang à huit pas . les deux maîtres se placèrent chacun devant un rang le directeur sortit de l’école et se plaça en dehors des deux rangs ; les deux maîtres passèrent chacun devant son rang, regardant attentivement les élèves pour voir s’ils étaient bien alignés. Quand ils eurent fini, le directeur fit un signe ; aussitôt les deux maîtres tapèrent un coup dans leurs mains ; d’un seul mouvement les élèves des deux rangs se tournèrent par le flanc, ceux du premier rang vers la gauche et ceux du second rang vers la droite. J’admirais encore la vitesse , la précision , l’ensemble , la régularité de ce premier mouvement quand le directeur fit un second signe , et alors , d’un seul geste des deux maîtres en chantant tapèrent en cadence dans leurs mains , et les élèves en chantant marchèrent au pas , régulièrement , en chœur , les uns derrière les autres . Le rang des petits se dirigea vers la porte la plus éloignée ; ils entrèrent un par un, toujours en chantant.
Aux premières notes se leur chanson, j’avais senti au-dedans ce coup profond qui me donne envie de pleurer ; aussitôt une émotion de surprise et d’admiration m’avait tout entier d’un seul coup envahi. Jamais je n’aurais inventé cela ; jamais je n’aurais même osé supporter cela : jamais je n’aurais supposé que l’on pût comme eux chanter et marcher d’un tel accord au lieu de marcher comme tout le monde.
Cela finit gauchement, ridiculement. Ma grand-mère, qui avait entendu sonner onze heures à la fonderie, était sortie sur le pas de la porte. Je fis semblant de ne pas la voir et je continuais à défiler