La coupe des libations
Vénérable maître et vous tous mes frères en vos grades et qualités,
La coupe des libations.
Rétrospectivement, un bandeau sur les yeux, j’étais très impressionné et me demandais ce que j’allais subir. Après la rédaction de mon testament philosophique, dans ce petit cabinet mal éclairé, avec pour toute compagnie très Shakespearienne un crâne, non pas celui de Iago, mais d’un illustre inconnu, j’avais beau me dire, pour me rassurer, que tout ça faisait partie d’une mise en scène, je n’en menais pas large !
Bien sûr, je me disais que tous ces hommes très sympathiques venus m’enquêter ne me voulaient que du bien, mais quand même, à 26 ans, j’avais un peu, comme on le dit vulgairement, les « fois » !
J’arrivais donc, les yeux bandés, avec tout un cérémonial, dans un nouvel espace où je ressentis une présence nombreuse autour de moi. Quelqu’un s’adressa à moi d’une voix ferme et autoritaire en me demandant de m’engager à « garder le silence absolu sur tout » ce que je pourrai entendre et découvrir parmi les personnes présentes. J’acquiesçais, bien évidemment, très impressionné, car le ton ne semblait pas m’offrir d’autre choix et puis, quand même, j’étais là pour ça !
Quand ensuite, je bus de l’eau et que de nouveau on me fit prêter serment de silence absolu sur la nature de toutes les épreuves que j’allais subir, mon courage fondit un peu plus. Puis on m’ordonna de boire de nouveau et grande fut ma surprise quand l’eau eut soudain ce goût amer auquel je ne m’attendais pas. J’avoue avoir été également mécontent de mettre fait avoir aussi facilement, car ayant goûté, fort à propos, le stress desséchant ma bouche en permanence, de l’eau, je ne m’attendais, bien évidemment, qu’à en boire de nouveau de la même qualité. Bien sûr, je ne me doutais pas que les épreuves, annoncées par la voix autoritaire, avaient déjà commencé et que cette coupe en était la première.
Après, je me tins sur mes gardes pour