La fontaine les animaux malades de la peste
Avec Les Animaux malades de la peste, première fable du deuxième recueil, le livre s’ouvre sur l’évocation d’un royaume animal décimé par la peste. Le Lion, Roi des animaux, suggère un sacrifice expiatoire volontaire ( « dévouement » ) : que chacun confesse ses fautes, et qu’ on sacrifie « le plus coupable » pour le salut de tous. Le Lion donne l’exemple en s’accusant, et en se disant ensuite prêt à se « dévouer » (v. 23-24).
Qu’en est-il des autres animaux ? On verra que l’intervention rusée du Renard modifie sensiblement l’enjeu de cette confession publique : après son intervention, il ne sera plus question de justice ou de sincérité, mais de flatterie et de rapports de force.
I. LA RUSE DU RENARD
Si le Renard est le premier à parler, c’est qu’il a eu l’idée d’un stratagème qui va changer le sens de cette confession publique.
1. Le premier à parler
Loin de « s’accuser » de ses fautes, le Renard ne parle qu’ au Roi ( " Sire, [ . . . ] vous êtes trop bon Roi », v. 34) ; mieux, en niant les fautes du Roi-Lion, il évitera de parler de ses propres fautes. La flatterie se substitue donc à la confession attendue : le Renard s’efforce de diminuer la gravité des fautes dont le Roi s’est accusé. S’agissant des moutons ( " croqués" par le Lion (v. 36 à 38), le Renard ne recourt pas à un argument rationnel (en faisant valoir que le lion est carnivore) : sa flatterie transforme la réalité en renversant les valeurs (c’est un honneur pour les moutons de se faire manger par le Roi, v. 38). Quant au Berger (v. 39 à 42), la ruse du Renard consiste à le rendre coupable d’une faute politique : ce Berger s’est cru le Roi de son troupeau, il a usurpé une royauté ( "empire" ) qui n’appartient qu’au Lion. Après l’intervention du Renard, on ne regardera donc plus les fautes mais la qualité du coupable.
2. Le piège de la flatterie
C’est bien un piège qu’a construit le Renard : la cour est ainsi faite, que les courtisans ne peuvent pas ne pas "