La parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée
Le mensonge se définit couramment comme une parole différente de la pensée de celui qui l’énonce. Cette définition permet d’abord de distinguer, dans les formes que prend le faux, le mensonge de l’erreur, qui est de bonne foi, car conforme à la pensée de celui qui la commet. Elle permet aussi de remarquer qu’on peut parfois mentir tout en disant, par erreur donc involontairement, la vérité, si on avait justement l’intention de ne pas la dire. Le mensonge est donc essentiellement intention de tromper, c’est-à-dire de dissimuler sa pensée. Que le mensonge soit parfois utile, peu le contesteront. Est-il pour autant moralement justifiable ? Peut-on invoquer, dans certaines conditions, un droit moral de mentir ? Nous verrons que le mensonge est à proscrire, parce qu’il est source de faux, et qu’il empêche l’homme d’accèder au vrai, mais que pourtant il est fortement utilisé pour diverses raisons Enfin, que dans certaines conditions le mensonge peut être au service du vrai et du juste.
Le mensonge est moralement désapprouvé.
Dorante oppose à Madame Argante une fin de non-recevoir losqu’elle lui demande de dire à Araminte, pour l’inciter à épouser le comte, qu’elle perdrait son procès. « Mais madame, il n’y aurait point de probité à tromper. » Il soutiendra la même position face à Marton dans la scène suivante. « Croyez-moi, disons la vérité ». Et il est soulagé quand l’attitude intéressée de Marton, qui gagnerait mille écus en cas de mariage d’Araminte avec le comte lui fournit un prétexte pour se donner bonne conscience vis-à-vis d’elle : « Je ne suis plus si fâché de la tromper ». Socrate quant à lui sous entend qu’il y a un renoncement moral à soutenir indifféremment une chose et son contraire, mais