La religion de l'Etat d'Alain Boureau (fiche universitaire de lecture)
La religion de l’Etat,
Paris, Les Belles-Lettres, 2006, 351 p.
Par Justine Barbot.
« L’Etat n’était qu’une réalité possible parmi d’autres ; cependant sa définition scolastique créa durablement, par exigence ou par nostalgie, la forme intellectuelle et morale de la « religion de l’Etat ».1 »
Thomas d’Aquin (à droite), Saint Dominique et la Vierge à l’enfant, de
Fra Angelico, 1420. Le peintre du Quattrocento, religieux dominicain, a mis en lumière dans ses œuvres le thomisme méthodologique.
BOUREAU, A., La religion de l’Etat : La construction de la République étatique dans le discours théologique de l’Occident médiéval
(1250-1350), Paris, Les Belles-Lettres, 2006, p. 287.
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Prologue
L’historien Alain Boureau fit publier en 2006, La religion de l’Etat, concept historique implicite de la République étatique dans la grande scolastique, « l’histoire de l’idée ou du rêve de l’Etat, pensé comme nécessité historique ou salutaire.2 » En d’autres termes, la structuration progressive de l’Etat combinant l’universalité du genre humain et la considération d’un ensemble particulier.
L’ « Etat-république3 » serait un fruit idéologique latent né dans la pensée scolastique de 1200 à
1350. Que faut-il entendre par pensée scolastique ? Elle serait une espèce de philosophie (au sens d’études d’activités savantes) enseignée et développée durant la période médiévale dans les universités naissantes principalement. Sa spécificité est « de constituer pour la première fois en
Occident une science de l’homme, en complément exact de la science de Dieu4 ». Elle vise à concilier la philosophie grecque5 et la théologie chrétienne6. Le chef de file de la scolastique est incontestablement
Thomas d’Aquin, religieux dominicain. Il fut celui qui renoua la philosophie première à la théologie7, la première se faisant servante de la seconde (philosophia ancilla theologiae) pour atteindre la béatitude par la connaissance. Thomas d’Aquin mit en