La xenophobie en milieu ouvrier : une exageration qui a la vie dure
(Aigues-Mortes, 17 août 1893) Ed Fayard 2010
Le 17 août 1893, dans les marais salants d’Aigues-Mortes où la récolte du sel rassemblait des centaines de travailleurs français et italiens, s’est déroulé une émeute opposant « trimards » français et ouvriers immigrés italiens. Au moins 8 italiens ont été tués et des dizaines d’autres blesses. En dépit des preuves accablantes réunies contre les saisonniers autochtones, les assassins furent tous acquittés. Directeur d’études à l’EHESS (école des hautes études sociales) et membre de la commission gouvernementale antiraciste, Noiriel a étudié de près le déroulement du drame, l’expliquant comme conséquence des mutations politiques et économiques de la fin du XIXe siècle. Selon lui, les discours officiels sur la fierté d’être français ont incité les laissés-pour-compte de la République à s’acharner contre ces étrangers ; le patronat, les militaires, les journalistes, les juges et les politiciens sont parvenus à échapper à leurs propres responsabilités. L’analyse est assez réductrice et conforte les ignorances sur les causes réelles et la théorie gauchiste bobo d’un racisme éternel intrinsèque aux classes pauvres. Noiriel en rajoute une couche, en refaisant l’histoire de la fin du XIXe siècle mais à la lumière de ce qu’il voit en ce début du XXIe siècle. C’est une sorte d’histoire à l’envers qui, sous couvert d’érudition du passé, jette la confusion et tente de ressourcer les idées humanistes, intemporelles et hypocrites de la bourgeoisie ; il n’est donc pas étonnant qu’il soit publié chez Fayard, en tant que membre d’une commission gouvernementale. A propos des Italiens tués lors des affrontements sanglants de ce 17 aout 1893, Noiriel parle explicitement de « victimes de l'identité nationale », avec une allusion plus qu'évidente à ce qui se passe de nos jours. En faisant un parallèle avec la situation actuelle, il conteste bien la