La ‘deixis surréaliste’. breton, le genre textuel et l’énonciation de la subjectivité
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Licia Taverna La ‘deixis surréaliste’. Breton, le genre textuel et l’énonciation de la subjectivité
Le langage reproduit le monde, mais en le soumettant à son organisation propre.
Émile Benveniste, Problèmes de linguistique générale
La deixis, pourrait-on dire, est liée à l’instance d’énonciation et à son co-locuteur potentiel, les seules entités à partir desquelles les coordonnées spatio-temporelles énoncées peuvent être correctement interprétées. Pour la plupart des linguistes, en effet, l’univers de la deixis est constitué de l’ensemble des marques, à fonctionnement sémantico-référentiel, qui renvoient à l’instance d’énonciation : il s’agit de tous les éléments, inscrits dans l’énoncé, qui se réfèrent à la situation de communication ‘réelle’ de l’énonciateur (par exemple, sa perception du temps ou la position qu’il occupe dans l’espace, etc.). Toutefois, si l’on essaye d’expliquer les termes utilisés dans la plupart des définitions linguistiques concernant la deixis (y compris les termes précédemment employés), la question reste ouverte et se complique. Qu’entend-on, par exemple, lorsqu’on parle de situation de communication ? Et d’ailleurs, situation de communication et instance d’énonciation sont-elles équivalentes ? Ou encore : le recours à la notion de réel, est-il inévitable ? Selon la définition proposée par Kerbrat-Orecchioni, les déictiques impliquent la prise en compte du :
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[1] – rôle que tiennent dans le procès d’énonciation les actants de l’énoncé, – la situation spatio-temporelle du locuteur, et éventuellement de l’allocutaire. Il importe d’insister sur ce point qui prête à de fréquentes méprises : ce qui « varie avec la situation », c’est le référent d’une unité déictique, et non pas son sens, lequel reste constant d’un emploi à l’autre (Kerbrat-Orecchioni 1999 : 41 ; souligné dans le texte).
Suivant cette définition, la deixis n’est