Le bal Irène Némirovsky
LE BAL
1928
Table des matières
I ................................................................................................. 3
II .............................................................................................. 10
III ........................................................................................... 20
IV .............................................................................................24
V ..............................................................................................32
VI ............................................................................................ 40
À propos de cette édition électronique ................................... 55
I
Mme Kampf entra dans la salle d’études en fermant si brusquement la porte derrière elle que le lustre de cristal sonna, de toutes ses pendeloques agitées par le courant d’air, avec un bruit pur et léger de grelot. Mais Antoinette n’avait pas cessé de lire, courbée si bas sur son pupitre, qu’elle touchait la page des cheveux. Sa mère la considéra un moment sans parler ; puis elle vint se planter devant elle, les mains croisées sur sa poitrine.
– Tu pourrais, lui cria-t-elle, te déranger quand tu vois ta mère, mon enfant. Non ? Tu as le derrière collé sur ta chaise ?
Comme c’est distingué… Où est miss Betty ?
Dans la pièce voisine, le bruit d’une machine à coudre rythmait une chanson, un What shall I do, what shall I do when you’ll be gone away… roucoulé d’une voix malhabile et fraîche.
– Miss, appela Mme Kampf, venez ici.
– Yes, Mrs Kampf.
La petite Anglaise, les joues rouges, les yeux effarés et doux, un chignon couleur de miel roulé autour de sa petite tête ronde, se glissa par la porte entrebâillée.
– Je vous ai engagée, commença sévèrement Mme Kampf, pour surveiller et instruire ma fille, n’est-ce pas ? et non pour vous coudre des robes… Est-ce qu’Antoinette ne sait pas qu’on se lève quand maman entre ?
–