Le ghetto français – eric maurin
Le territoire s’est imposé ces dernières années comme le révélateur des nouvelles inégalités. Néanmoins, il exhibe certaines formes de ségrégation et en dissimule d’autres.
Le « ghetto français » n’est pas tant le lieu d’un affrontement entre inclus et exclus, que le théâtre sur lequel chaque groupe s’évertue à fuir ou à contourner le groupe immédiatement inférieur dans l’échelle des difficultés.
I – La société de l’entre-soi :
Une ghettoïsation par le haut :
La société française était et reste très loin d’un idéal de mixité. Si déchirement il y a, il est d’abord l’œuvre d’élites qui mobilisent toutes leurs ressources pour se mettre à l’écart. Ce n’est pas tant la richesse actuelle des familles que les attributs les plus durables et les plus identitaires de cette richesse (diplôme).
Les quartiers de pauvres :
La concentration des familles pauvres est plus un phénomène par défaut que le résultat d’une stratégie active de leur part (c’est parce que les riches, en s’installant dans les beaux quartiers, maintiennent le prix élevé de ces derniers). Le manque de diplôme et de qualification est à l’origine des formes de pauvreté les plus permanentes, et donc les plus pénalisantes sur le marché du logement.
Ghettos d’immigrés :
Sur le marché du logement, ne pas avoir la nationalité française ou être issu de l’immigration constitue la véritable pauvreté. Et même à niveau de diplôme et de revenu donné, les personnes étrangères (peuvent pas être fonctionnaires) souffrent de ne pouvoir toujours donner les mêmes garanties de solvabilité que les personnes françaises, mais aussi, tout simplement, de discrimination raciale.
Ségrégation et embourgeoisement :
Les processus de ségrégation sont relativement anciens. Alors pourquoi donnent-ils l’impression de s’aggraver ? Parce que la société française a beaucoup changé du point de vue de l’importance respective des différentes classes sociales dans l’ensemble de la