Le mans Fc
FAUBLAS (1787-1790) DE LOUVET DE COUVRAY
Les romanciers du XVIIIe siècle semblent avoir considérablement emprunté au théâtre afin de renouveler la poétique d’un genre dont les multiples formes témoignent de sa malléabilité. Le roman puise dans le théâtre où il trouve une matière pour le contenu (caractères, type de scène, sujets et visée morale) et pour la forme de son récit (effacement du narrateur au profit du dialogue entre les personnages). Néanmoins, le cas du roman-mémoires est, suivant cette perspective, tout à fait singulier, puisqu’il appartient à une catégorie de romans qui paraît la plus éloignée du genre dramatique. C’est pourquoi la théâtralité du roman-mémoires repose sur un paradoxe selon lequel un récit du « moi », qui se veut intime – narration à la première personne par un « je » qui raconte sa vie sous forme de mémoires –, s’ouvre au spectaculaire. Mais si la théâtralité de ce type de roman se manifeste à différents niveaux, celle des dialogues mérite une attention particulière dans
Les Amours du chevalier de Faublas de Louvet de Couvray.
En effet, la théâtralité de ce roman-mémoires repose, entre autres, sur la surabondance des dialogues qui allège et agrémente la lecture des mille soixante-trois pages de l’édition Gallimard.
« C’est, ce me semble, où le personnage va parler, que l’auteur doit cesser d’écrire1
», observe
Louvet dans la préface de la troisième et dernière partie du roman. À l’exception de cette brève remarque, l’auteur ne donne aucune explication sur l’omniprésence des dialogues dans la narration et revendique les négligences qu’on y trouve, au nom du vrai, du naturel et de la simplicité2 . Il n’apporte pas davantage d’éclaircissement sur les dialogues dont les répliques sont disposées typographiquement comme dans une pièce de théâtre. À onze reprises, le récit romanesque devient momentanément dialogue théâtral. Le narrateur