Le meurtre de jeanlin germinal emile zola
309 mots
2 pages
Un instant, Etienne hesita a l'appeler, pour l'empecher de faire quelque betise. La lune s'etait cachee, il l'avait vu se ramasser sur lui-meme, pret a bondir; mais la lune reparaissait, et l'enfant restait accroupi. A chaque tour, la sentinelle s'avancait jusqu'a la cabane, puis tournait le dos et repartait. Et, brusquement, comme un nuage jetait ses tenebres, Jeanlin sauta sur les epaules du soldat, d'un bond enorme de chat sauvage, s'y agrippa de ses griffes, lui enfonca dans la gorge son couteau grand ouvert. Le col de crin resistait, il dut appuyer des deux mains sur le manche, s'y pendre de tout le poids de son corps. Souvent, il avait saigne des poulets, qu'il surprenait derriere les fermes. Cela fut si rapide, qu'il y eut seulement dans la nuit un cri etouffe, pendant que le fusil tombait avec un bruit de ferraille. Deja, la lune, tres blanche, luisait.
Immobile de stupeur, Etienne regardait toujours. L'appel s'etranglait au fond de sa poitrine. En haut, le terri etait vide, aucune ombre ne se detachait plus sur la fuite effaree des nuages. Et il monta au pas de course, il trouva Jeanlin a quatre pattes, devant le cadavre, etale en arriere, les bras elargis. Dans la neige, sous la clarte limpide, le pantalon rouge et la capote grise tranchaient durement. Pas une goutte de sang n'avait coule, le couteau etait encore dans la gorge, jusqu'au manche.
D'un coup de poing irraisonne, furieux, il abattit l'enfant pres du corps. --Pourquoi as-tu fait ca? begayait-il eperdu.
Jeanlin se ramassa, se traina sur les mains, avec le renflement felin de sa maigre echine; et ses larges oreilles, ses yeux verts, ses machoires saillantes, fremissaient et flambaient, dans la secousse de son mauvais