Le pain ponge
C’est en 1942 que Ponge, depuis peu arrivé à Lyon et côtoyant de près les milieux de la Résistance, rencontre les intellectuels de son époque : Paulhan, Camus, Aragon, etc. Lors de cette période extrêmement féconde, il écrit et veut faire publier Le Parti-Pris des choses. Il confie le manuscrit à Paulhan, qui, curieusement, le perd. Ponge réussit à retrouver la majeur partie du texte, mais certains poèmes sont irrémédiablement perdus.
L’œuvre se présente comme une œuvre close, composée de textes courts et difficilement qualifiables. Peut-on parler de poèmes en prose ? De textes descriptifs ? Quoi qu’il en soit, le poète semble tenter de réduire un objet, une chose, une personne parfois dans une formule ou une définition. En réalité, plutôt qu’une entreprise de réduction, il s’agit davantage de rendre compte de la globalité du monde. Le monde est fait d’objets multiples, entre lesquels on peut tisser des liens, mais aussi d’objets qui sont fondamentalement uniques car différents. Il faut pour le poète aller au cœur des choses : « la beauté du mystère de chaque chose naît de la précision de la description ».
Le texte « Le pain » montre tout d’abord l’intérêt du poète pour le quotidien, l’ordinaire, qui devient soudain objet poétique. Comment Ponge réussit-il le pari de prendre quelque chose d’ordinaire pour créer un texte qui ne le sera pas ? En quoi peut-on lire ce poème, au fil des multiples interprétations possibles, comme une leçon de chose ?
Le titre est tout d’abord intéressant : l’objet est présenté avec un article défini, comme il le serait dans une entrée de dictionnaire. Il nous prépare à lire une définition, une « leçon de chose ».
La structure du poème forme également une classification :
§1 et §2 : Aspects extérieurs du pain
§3 : intérieur
§4 : chute brutale, et conclusion morale ?
Dès les premiers mots, il y a une forme de dépassement de l’ordinaire : « merveilleux ». L’objet