Le pin des landes de théophile gauthier
On ne voit en passant par les Landes désertes,
Vrai Sahara français, poudré de sable blanc,
Surgir de l'herbe sèche et des flaques d'eaux vertes
D'autre arbre que le pin avec sa plaie au flanc ;
Car, pour lui dérober ses larmes de résine,
L'homme, avare bourreau de la création,
Qui ne vit qu'aux dépens de ce qu'il assassine,
Dans son tronc douloureux ouvre un large sillon !
Sans regretter son sang qui coule goutte à goutte,
Le pin verse son baume et sa sève qui bout,
Et se tient toujours droit sur le bord de la route,
Comme un soldat blessé qui veut mourir debout.
Le poète est ainsi dans les Landes du monde ;
Lorsqu'il est sans blessure, il garde son trésor.
Il faut qu'il ait au cœur une entaille profonde
Pour épancher ses vers, divines larmes d'or !
Théophile Gautier (1811-1872), Espana
Dans la communauté des hommes, le poète tient une place particulière. Sa vision aigue et douloureuse de l’humanité en fait à la fois sa victime et son bienfaiteur. Dans Le pin des Landes poème romantique tiré du recueil Espana, Théophile Gautier tente de définir la condition du poète. Il joue sur les comparaisons et fait appel aux sens du lecteur pour exposer la singularité de cette condition inspirée.
Le poème Le pin des Landes est construit sur une comparaison. Dans la première strophe, Gautier décrit d’abord les Landes puis le pin qui est l’objet du poème. « On ne voit, en passant par les Landes désertes, […] D’autre arbre que le pin avec sa plaie au flanc ». La dernière strophe fait écho à la première. Le poète y établit la comparaison et donne les clés nécessaires pour décoder le sens du poème. « Le poète est ainsi dans les Landes du monde » « ainsi » marque le parallèle entre le poète et le pin, l’arbre devient alors homme et les landes s’étendent jusqu'à devenir monde.
L’auteur recourt aussi à une véritable personnification de l’arbre qui s’accentue au fur et à