Le regard porté sur les monstres
Alors que le mot "monstre" paraît actuellement se réduire d'une part, aux créatures imaginaires, notamment cinématographiques, et d'autre part à sa signification morale, il en allait différemment à la Renaissance et à l'Age classique. Le mot "monstre" était fréquemment utilisé et s'appliquait d'abord aux êtres humains et animaux affectés de déformations morphologiques importantes, ainsi qu'à des créatures composites aux formes étonnantes.
La période de référence du livre-exposition est vraiment le temps des monstres, pour deux raisons essentielles.
A) Une définition très large du mot "monstre":
La première est que le mot "monstre" (qui ne correspond pas à la définition actuelle), connaît sa plus grande extension avec le traité Des monstres et prodiges du chirurgien Ambroise Paré (première édition: 1573, édition augmentée:1585). Des êtres humains porteurs de malformations morphologiques majeures (une fille à deux têtes ou des jumelles soudées) et des animaux aux corps déformés (un porc monstrueux à huit pattes et quatre oreilles), voisinent avec la baleine, "le plus grand monstre qui se trouve en la mer", des animaux exotiques comme le caméléon, ainsi que des phénomènes cosmologiques comme les comètes, puisque Paré consacre un chapitre aux "monstres célestes".
D'improbables monstres associant des caractères animaux et humains, comme un poulain à tête d'homme ou le célèbre enfant demi-chien, et d'extraordinaires monstres composites comme l'illustre monstre de Ravenne, trouvent aussi leur place dans cet ouvrage.
B) Des sources variées:
La seconde raison pour laquelle cette période est vraiment le temps des monstres vient du fait que, autour des monstres ont d'abord convergé des sources variées, avant que ne s'affrontent des savoirs concurrents. A partir de la seconde moitié du seizième siècle, les monstres font l'objet d'une recension passionnée et ne relèvent pas du domaine exclusif des médecins ou chirurgiens. Des monstres