Les animaux des fables sont ils des personnages ?
Je voudrais réexaminer ici les propositions de Vincent Jouve sur cet «effet-personnage» que produiraient les textes sur leurs lecteurs, et, plus largement, poser la question suivante: les «théories de la réception» théorisent-elles la réception? Je procèderai en opérant un double déplacement. D'une part, je m'intéresserai, plutôt qu'à la description idéale des opérations accomplies par le «lecteur modèle» volontiers convoquée par les théoriciens de la réception, à l'étude d'un certain type de lecture, qui a l'avantage (si c'en est un) d'être attesté ou réel, bien que non superposable à l'ensemble des lectures dites «ordinaires»: je veux parler du commentaire critique[3]. D'autre part, je choisirai un exemple tout à fait extérieur au corpus retenu par Vincent Jouve pour sa description de «l'effet-personnage», non pas un roman, mais un genre, et une œuvre, que Jouve exclut résolument de son corpus: l'apologue, et les Fables de La Fontaine.
Cette exclusion repose sur la proposition suivante: l'apologue est une fiction dépourvue de tout personnage; ou, plus exactement, il ne saurait produire sur son lecteur d'effet-personnage. C'est du moins ce que l'on est invité à déduire