Les limes
Le limes est une déclinaison du système stratégique de l’Empire Romain. Conceptualisé par Polybe au IIe siècle avant Jésus Christ, il représente la frontière séparant et protégeant l’Empire Romain unifié du monde barbare. Si le limes matériel et fortifié ne se réalise qu’à partir du IIe siècle après Jésus Christ (en témoigne le Mur d’Hadrien), son double principe de préservation et d’unification du monde romain est consubstantiel à l’idée impériale, et sera donc la constante stratégique de l’Empire Romain pendant près de six siècles.
Le limes est donc une représentation particulière de l’idée de frontière, dès lors qu’il ne se conjugue qu’en termes d’empires. Son utilisation pour décrire le monde contemporain n’en est pas moins vaine, à condition d’assimiler l’Occident à un nouvel empire.
Les limes contemporains : une représentation de la frontière Nord / Sud
Le français Jean-Christophe Rufin a été le premier à actualiser l’idée de limes dans son bien-nommé ouvrage L’empire et les nouveaux barbares (1991). Selon l’auteur, le « limes contemporain » représenterait la délicate frontière Nord / Sud. Il s’agit d’une réinterprétation de celle-ci : elle n’oppose pas deux mondes antagonistes (comme ce put être le cas durant quarante ans d’affrontement Est / Ouest) mais plutôt existe par et pour le Nord, dès lors que celui-ci cherche, par ce nouveau limes, à se distinguer comme Empire en se protégeant des « nouveaux barbares » qu’incarne le Sud. Les deux nouvelles entités Nord et Sud n’existent donc que par ce « limes contemporain » puisque que c’est de leur opposition que résulte leur statut propre.
Néanmoins, il ne s’agit pas d’un front. Si le limes est une ligne d’opposition, il permet avant tout la préservation de la partie dominante. En cela, c’est une limite d’équilibre voire de paix, imposée par le Nord, tout comme l’Empire Romain imposait la pax romana à l’intérieur de ses frontières. L’objectif est de préserver le statut de « Nord » ou