Delphine Amstutz, préparation aux agrégations de lettres (2023) – Sorbonne Université
1
Les songes dans les tragédies de Tristan
« La vie est un songe » – telle paraît être la devise d’une époque moderne volontiers qualifiée d’âge
« baroque ». De Calderón à Shakespeare, l’Europe des XVIe et XVIIe siècles paraît à la fois fascinée et effrayée par l’inconsistance ontologique de la vie mondaine, comparée à la texture mensongère d’un spectacle de théâtre, dont Dieu seul serait le véritable auteur …afficher plus de contenu…

Deux personnages sont sur scène, l’ombre protatique et le dormeur, ou une ombre fait son apparition seule sur scène, et le héros entre ensuite en scène dans le plus complet bouleversement, le monologue de l’ombre faisant office de simple prologue. C’est le cas dans Mariamne de Hardy, ainsi que dans Alcméon ou La Mort d’Alexandre. Quel est le déguisement, quel est le jeu des acteurs qui incarnent les ombres ? « C’étaient des cadavres, dont les os, détail à peu près constant, apparaissaient à travers la peau déchirée, mais dont le visage, blanchi, gardait sa physionomie propre (…). Ces personnages effroyables s’avançaient sur scène en …afficher plus de contenu…

Dans le songe tel qu’elle le rapporte, c’est à elle qu’Auguste s’adresse et confie la mission de sauver la vie de Néron, c’est elle qui crie pour avertir les dieux, Cérès et Bacchus, et faire tomber le couteau des mains de Mars. Ce songe/mensonge16 s’oppose aux « visions » véridiques de Pison (IV,1).
Dans Osman, l’interprétation du songe inaugural de la sultane sœur pose un problème différent au spectateur. Endormie, la sultane voit que l’ « on […]épanche à [s]a vue » le sang du « plus grand des mortels et le plus glorieux » (vers 3-4). Si le pronom indéfini « on » permet de ne pas dévoiler immédiatement l’identité de la menace qui pèse sur la vie d’Osman, le spectateur est, plus fondamentalement, en droit de s’interroger sur la pertinence de la caractérisation du sultan, qui apparaît dans la pièce à la fois comme