Limitation des compétences de la justice pénale internationale
André-Marie YINDA YINDA
Université de Yaoundé I/GRAPS
Le renouvellement épistémologique et les recompositions politologiques1 qui sont issus des transformations en cours dans le système international postbipolaire 2 posent ensemble à l’analyse philosophique-politique au moins deux situations critiques : leur irruption inédite dans le temps et leur mobilisation fluide dans l’espace. La première, recouvrant l’idée de contingence historique, est perçue et vécue comme un phénomène tout à fait inattendu voire une surprise pour la modernité et sa foi en la nécessité du sens de l’histoire, en son progrès logique et en l’absoluté du principe de l’Etat. Désormais la ruse semble avoir subvertie la raison dans l’histoire. Et la philosophie de l’histoire hégélienne constitue le moment par excellence où s’assume cette contradiction. (Habermas, 1981b : 950-969 ; 1988)3. La seconde situation critique, entre flexibilité et fugacité, met à mal le principe d’identification du mouvement dans l’espace par sa capacité de contraction et d’ubiquité qui tend à nier le mouvement, la distance et la durée (Bensaïd, 1997), rappelle de manière aporétique les paradoxes du mobilisme de Zénon d’Elée et enfin redonne du relief aux arguments relatifs à l’achèvement de la souveraineté (Mairet, 1997 : 162-181). Ces deux situations installent ainsi la philosophie politique contemporaine dans l’inconfort d’une modernité nostalgique où espace et temps demeurent « les formes a priori de la sensibilité » (Kant, 1997) et conditionnent encore la possibilité du rapport à l’expérience fut-elle politique (Renaut, 1997 : 456-491)4. L’essentiel de ce débat contemporain porte précisément sur la détermination du contenu du concept politique moderne en face de sa variante – pour ne pas dire son succédané critique – postmoderne (Habermas, 1981a : 3-22) ainsi que sa capacité – davantage de son incapacité – à