Logement et mobilité
Eric Widmer², Gilbert Ritschard² & Nicolas S. Müller² Avec la collaboration de Alexis Gabadinho², Jacques-Antoine Gauthier³ et Matthias Studer² ²Universités de Genève et ³Lausanne
Tant la sociologie de la famille que la sociologie des professions affirment que les trajectoires qu’elles questionnent ont été organisées jusque dans les années 70 de manière linéaire, qu’elles suivaient une logique d’étapes clairement identifiable, respectée par l’énorme majorité des individus (Sapin, Spini & Widmer, 2007). Martin Kohli (1986), par exemple, fait l’hypothèse qu’un mouvement continu de standardisation des parcours de vie a marqué l’Occident depuis le XVIIIe siècle. Les transitions de la vie ont été progressivement prises en charge, dans la modernité, par des institutions structurant la vie sociale : école, armée, politique sociale, marché du travail, marché de la consommation, églises. Ces institutions ont défini des modèles typiques de trajectoires, en promulguant des normes d'âge (Kohli, 1986). Elles ont participé à créer un ensemble de représentations collectives et de références partagées (Lalive D’Epinay et al, 2005) concernant ce que l’on doit, ce que l’on peut, et ce que l’on ne doit pas, faire ou être selon son âge chronologique. Cette horloge sociale indique-t-elle toujours l’heure aux parcours d’aujourd’hui ? Les sociologues s’interrogent sur le maintien de ces modèles standardisés de parcours. L’hypothèse alternative de « pluralisation » (Kohli, 1986) a gagné une popularité considérable depuis les années 70, à tel point qu’elle a aujourd’hui un statut de quasi-monopole dans les recherches sociologiques portant sur le parcours de vie. Cette hypothèse postule que la modernité est associée à une