Les camps de concentration et d'extermination n'ont pas seulement permis à des sadiques de donner libre cours à leurs mauvais instincts. Ils étaient l'application d'un système, qui serait devenu permanent avec la victoire des nazis, et qui était lié à des conceptions politiques et morales de supériorité de race et de domination par la force. L'alimentation insuffisante développait, chez les détenus, toutes formes de maladies de carences : amaigrissement jusqu'au squelette ou monstrueux oedèmes, avec toutes les psychoses de la faim. Le travail forcé, la promiscuité, l'absence d'hygiène l'insuffisance des soins étaient la cause d'un taux élevé de mortalité, qu'aggravèrent encore des épidémies de typhus. Dans les blocks d'isolement avaient lieu de prétendues expériences scientifiques : inoculation du paludisme et du typhus, castration et essais de stérilisation, brûlures au phosphore, sujets placés dans l'état d'une personne élevée à 10 000 mètres et brusquement retombée, épreuves de résistance au gaz ou au froid, et mêmes pratiques de vivisection. De loin, les camps pouvaient ressembler à des maisons de fous, avec les tenues grotesques des déportés, les inapplicables mesures d'hygiène ("un pou, c'est ta mort", disait une inscription), les pancartes où s'affichait un incompréhensible humour ("le travail, c'est la liberté"), les projections de films sur des vacances aux Baléares... En fait, ils marquent le degré le plus bas où ait jamais pu descendre la barbarie; "enfer organisé", "camps de la mort lente", ils ont coûté la vie à des millions de personnes.
Lorsque vint, pour l'Allemagne, le commencement de la fin, ses maîtres auraient voulu faire disparaître toutes les traces de l'organisation concentrationnaire, afin que personne ne sût jamais ce qui s'y était passé, et que leur crime restât ignoré. Mais les bourreaux n'eurent pas toujours le temps de procéder à l'élimination immédiate des survivants. On procéda à