ordre et désordre
LE POINT DE VUE PHILOSOPHIQUE
PAR
Bernard PIETTRE
Professeur de Philosophie
Nous craignons le désordre et désirons l'ordre. Nous pourchassons, dans la vie sociale, les fauteurs de désordre. Nous préférons une chambre, un bureau ou des papiers en ordre plutôt qu'en désordre. Nous aimons, de façon générale, nous repérer dans un ordre social, historique, naturel, cosmique.
Les notions d'ordre et de désordre relèvent du discours pratique, éthique, politique, voire mythique et religieux. Elles semblent être plus normatives que descriptives; et avoir plus de valeur que de réalité.
Or est-on en mesure de donner aux notions d'ordre et de désordre un contenu objectif, une valeur de vérité descriptive, "scientifique", indépendamment de toute la connotation pratique, éthique, esthétique, politique ... qu'elles possèdent par ailleurs? Certes connaître les choses, pour mieux agir éventuellement sur elles, c'est mettre de l'ordre en elles. A cet égard le désir de connaissance relève aussi d'un désir de l'ordre. Cependant on est en droit de dire que la science nous donne des moyens de distinguer objectivement des phénomènes ordonnés de phénomènes désordonnés. Quel sens précis prennent alors les termes d'ordre et de désordre dans le champ de la pensée scientifique?
Mais on aurait tort d'imaginer que cette question puisse avoir une réponse simple, comme si la pensée scientifique détenait l'objectivité d'un savoir clos et définitif. Répondre à cette question c'est interroger l'histoire des sciences, et s'intéresser à certains de ses développements récents ou actuels qui ne sont pas sans susciter des débats philosophiques profonds.
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DÉSORDRE(S)
Au regard de l'histoire des sciences - et de la philosophie dont elle est inséparable -le terme ordre est entendu au moins en deux sens contradictoires:
- ou bien l'ordre est pensé comme finalisé, comme réalisant un dessein, poursuivant une direction et faisant ainsi sens. A cet égard