Pierre louýs
Psyché, ma soeur, écoute immobile, et frissonne...
Le bonheur vient, nous touche et nous parle à genoux
Pressons nos mains. Sois grave. Écoute encor...Personne
N'est plus heureux ce soir, n'est plus divin que nous.
Une immense tendresse attire à travers l'ombre
Nos yeux presque fermés. Que reste-t-il encor
Du baiser qui s'apaise et du soupir qui sombre?
La vie a retourné notre sablier d'or.
C'est notre heure éternelle, éternellement grande,
L'heure qui va survivre à l'éphémère amour
Comme un voile embaumé de rose et de lavande
Conserve après cent ans la jeunesse d'un jour.
Plus tard, ô ma beauté, quand des nuits étrangères
Auront passé sur vous qui ne m'attendrez plus,
Quand d'autres, s'il se peut, amie aux mains légères,
Jaloux de mon prénom, toucheront vos pieds nus,
Rappelez-vous qu'un soir nous vécûmes ensemble
L'heure unique où les dieux accordent, un instant,
À la tête qui penche,à l'épaule qui tremble,
L'esprit pur de la vie en fuite avec le temps.
Rappelez-vous qu'un soir, couchés sur notre couche,
En caressant nos doigts frémissants de s'unir,
Nous avons échangé de la bouche à la bouche
La perle impérissable où dort le Souvenir.
Pierre Louýs
***
L'aube de la Lune
Regarde la naissance ardente de la lune,
Ô Stulcas! c'est un coeur qui répand sur les eaux
Le sang d'une aube horrible au sommet des roseaux
Où Syrinx va gémir à sa triste fortune
Les ombres des palmiers s'éveillent,et chacune
Traîne deux fils de flamme à ses obscurs fuseaux,
Et les crins du centaure et l'aile des oiseaux
Se haussent, alourdis d'une pourpre importune.
Le bruit des palmes doux comme la pluie en mer
Verse une onde altérée à la ferveur de l'air;
Tout ruisselle et se perd goutte à goutte...Respire,
Stulcas, la lune est pure et sur le ciel plus clair
Notre bouc irrité par le vol du vampire
Se cabre dans l'orgueil d'échapper à la nuit
Pierre Louýs
***
L'Iris
Je t'apporte un iris cueilli dans une eau sombre
Pour