Portalis discours préliminaire
Il existe deux lois saliques: une Loi salique, code de droit pénal datant des Francs Saliens, et une loi salique, règle successorale forgée au début du XVe siècle, selon laquelle les femmes ne peuvent, en France, ni hériter ni transmettre la Couronne. Le nom de la première a été donné à la seconde par ses concepteurs, dans le but de faire croire à son ancienneté. Le lien entre les deux est que la seconde est constituée d'un article falsifié de la première. Cette invention n'a que partiellement à voir avec la prétention des monarques anglais à régner sur la France. Elle est surtout liée à la puissance de la «clergie» dans l'entourage royal à partir du XIIe siècle, et à sa prétention à gérer les affaires de l'État selon son idéal: entre hommes et entre experts.
- 507-511: fin du règne de Clovis, première rédaction connue du Pactus Legis Salicæ (« Pacte de la Loi salique »), code de loi des Francs Saliens, en 65 titres. Le titre 59, De alodis («des biens propres»), consacré à la succession des personnes mortes sans descendance vivante, précise dans son cinquième et dernier article: De terra vero nulla in muliere hereditas non pertinebit, sed ad virilem secum [sexum] qui fratres fuerint tota terra perteneunt («Quant à la terre, qu’aucune portion n’en échoie aux femmes, mais qu’elle aille toute au sexe masculin»).
Ce code de loi est pour l'essentiel une liste de tarifs visant à la composition des litiges entre familles (prix à payer pour un meurtre, un viol, une mutilation…). Tous les peuples dits «barbares» se sont dotés de tels codes, qui varient plus ou moins de l'un à l'autre. Rien n'y concerne l'organisation du pouvoir politique ni la succession au trône. L'exclusion des filles de l'héritage de la terre correspond à une exigence romaine, des temps où les Romains confiaient aux chefs de guerre Francs des terres en échange du service militaire. Ces chefs, une fois maîtres de la Gaule, semblent avoir voulu reconduire