Poésie
Etude de textes littéraires.
INTRODUCTION
Ce poème est un sonnet (ABAB-ABAB-CCD-EDE), Charles Baudelaire use souvent de cette forme dans Les Fleurs du Mal. L’ennemi, dans ce poème, c’est le temps, composante majeure du spleen baudelairien. On retrouve cette idée d’angoisse face au temps qui passe dans les poèmes « L’Horloge » et « Le goût du néant ». Cette fois, le poète décrit l’angoisse consciente du temps qui passe.
CHARLES B AUDELAIRE
(1821–1867)
X. L’ENNEMI
in Les Fleurs du Mal (1861)
Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage, Traversé çà et là par de brillants soleils ; Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage, Qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils. Voilà que j’ai touché l’automne des idées, Et qu’il faut employer la pelle et les râteaux Pour rassembler à neuf les terres inondées, Où l’eau creuse des trous grands comme des tombeaux. Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve Trouveront dans ce sol lavé comme une grève Le mystique aliment qui ferait leur vigueur ? – Ô douleur ! Ô douleur ! Le temps mange la vie, Et l’obscur ennemi qui nous ronge le cœur Du sang que nous perdons croît et se fortifie !
I. LES
SAISONS D ’ UNE VIE
Ce poème s’articule autour d’une métaphore filée sur le thème des saisons et du climat. Le poète s’implique directement dans cette description, et c’est de sa vie dont il décrit les étapes. La « jeunesse » (vers 1) du poète (premier quatrain) est comparée à un été bouleversé par les intempéries : « ténébreux orage » (vers 1) et « Le tonnerre et la pluie » (vers 2). Ces premières années de vie se sont construites en ombres et lumières (« çà et là », « ténébreux », « brillant »), tantôt emplies d’élans d’espoir, mais vite accablées par le poids du spleen. On note la présence de ponctuations fortes dans ce quatrain (« ; » et « . ») qui insistent sur cette alternance. Le choix d’une alternance ABAB pour la forme du sonnet (et non ABBA) suggère également